PREDICATION POUR LE CULTE A MARMANDE DU 2 JUILLET 2023

CULTE A MARMANDE DU 2 JUILLET 2023

Chers frères et sœurs,

Une lecture superficielle du discours de Jésus peut nous laisser croire que ses exigences sont insurmontables.

Il nous demande, à nous disciples, de l’aimer plus que nos proches, de porter courageusement notre croix, d’être prêt à perdre notre vie pour lui.

Pas facile, n’est-ce pas d’envisager un chemin où il faudrait se détacher de ceux que l’on aime et de nous mettre totalement à son service, au service de l’Eglise.

Dans ce passage, Jésus s’adresse à ses premiers compagnons qui, vous le savez, ont quitté leur métier, leur famille et leur village pour le suivre.

Nul doute que ces paroles ont eu pour conséquences la création des communautés monastiques, de frères, de sœurs qui se sont retirées du monde et ont vu leurs membres s’éloigner de leurs proches et rompre leurs liens amicaux et familiaux.

Je crois que nous ne devons pas être effrayés par ce qui, en apparence, semblerait être un enseignement radical et une demande bien difficile à accepter, à assumer.

Les réformateurs ne verront pas d’opposition de principe entre la vie spirituelle et la vie familiale. Ils valoriseront les deux comme étant complémentaires et permettant un accomplissement personnel.

Pour nous aujourd’hui, l’amour pour le Seigneur ne saurait s’opposer à l’amour pour tous nos proches, pour nos enfants, nos fratries ou nos parents.

Il s’agit plutôt de faire attention à des relations qui peuvent parfois être toxiques et construire une prison invisible autour de nous.

Nous savons que les liens familiaux peuvent parfois être étouffants et le premier service à rendre à un enfant, un adolescent est de lui permettre d’accéder à une autonomie qui va l’aider à faire des choix responsables librement.

La foi nous permet de replacer les liens d’affection qui nous unissent à nos proches à leur juste place. Quand on a la chance de ne pas être seul dans la vie, tout est don, tout est grâce.

Jésus, s’adressant à ses disciples leur dira plus tard : « Tous ceux qui auront quitté pour moi leurs maisons, ou leurs frères, leurs sœurs, leur père, leur mère, leurs enfants, leurs champs recevront cent fois plus et auront part à la vie éternelle » (Matt 19/29)

Jésus semble nous mettre en garde contre ce qui pourrait être une prison dorée comme peut parfois l’être une famille trop envahissante ou trop étouffante.

Quand la famille est simplement ressourcement et appui, il devient possible alors de donner à Christ la première place, la place centrale.

La voie, le chemin que nous ouvre le Seigneur élargit le cercle familial à tous ceux qui le suivent. La famille nucléaire, père, mère et enfants est dépassée pour s’étendre à tous les membres de la communauté, à l’Eglise et plus largement à tous les êtres humains.

L’amour que le Christ nous demande de lui porter n’est pas en concurrence avec l’amour pour nos tous proches ; il ne s’agit pas de les aimer moins mais de les aimer mieux.

Jésus n’exige pas un « esprit de sacrifice » qui consisterait à un renoncement permanent à tous les plaisirs simples de la vie.

Il rappelle simplement qu’on ne peut sauver, assurer sa vie en s’appuyant sur les seules logiques du monde que sont les richesses matérielles ou les liens familiaux.

Accepter d’offrir et de perdre sa vie pour le Christ, c’est la fonder sur une autre réalité que celle du monde, ce monde où le pouvoir, les avoirs et le désir de reconnaissance viennent polluer et pervertir les relations humaines.

Nous le voyons, chers frères et sœurs, rien d’insurmontable à répondre aux demandes de Jésus.

En donnant de notre temps à l’Eglise, en nous engageant à son service, en n’hésitant pas à parler de notre foi autour de nous, nous consacrons du temps et de l’énergie à une vie nouvelle.

Regardons le monde et la société autour de nous. Ils ne sont pas au diapason de l’enseignement et des paroles du Seigneur.

Nous ne pouvons que constater ce décalage, parfois même ce gouffre entre le message de l’Evangile et les réalités terrestres.

Se charger de sa croix peut sembler être se charger d’un poids écrasant. On se trompe en pensant cela. Jésus dit en effet que son joug est facile à porter et son fardeau léger (Mat. 11/30).

Porter sa croix dans le monde ne se traduit pas par la recherche de l’épreuve et de la souffrance à n’importe quel prix, ce qui serait plutôt du masochisme et du dolorisme.

Il s’agit simplement d’être des chrétiens, debout, qui témoignent de la réalité du royaume, d’une vision du monde autre.

Les exemples abondent autour de nous de ces chrétiens qui agissent et s’engagent au nom de l’Evangile. Mais sachons également discerner dans le monde associatif, politique et culturel des acteurs et des idéaux conformes à l’enseignement du Christ.

Amnesty International, créé en 1961 lutte ainsi pour les droits humains avec une certaine efficacité. Elle sera rejointe par l’ACAT 13 ans plus tard dans son combat.

Coluche va créer les restos du cœur, il y a bientôt 40 ans. Cette belle association reconnue d’utilité publique sert plusieurs dizaines de millions de repas par an à près d’un million de bénéficiaires en France.

Bien plus modestement mais avec efficacité cependant, notre petite entraide protestante de Tonneins sert un gros colis alimentaire hebdomadaire à une trentaine de foyers.

On découvre le visage du Christ dans chaque personne aidée, secourue, quand on prend le temps de la recevoir dignement et fraternellement.

La prise de conscience de l’importance des enjeux climatiques et écologiques est également un signe positif qui traduit, en particulier dans la jeunesse son souci de la création et de l’avenir de la planète.

Sachons écouter et accueillir les prophètes des temps modernes. Même si leurs paroles nous dérangent, nous surprennent, c’est peut-être à travers elles, le Christ que nous accueillons.

L’étranger, l’exclu, celui ou celle qui appartient à une minorité sexuelle attendent souvent que nos mains se tendent et que nos cœurs s’ouvrent.

Dans ses propos, Jésus nous appelle à ne pas faire de notre famille, notre Eglise un sanctuaire entouré de barbelés avec des gardes à chaque angle.

C’est tout le contraire ; ouvrons grand nos portes et nos fenêtres. Si nous connaissons tous la joie d’être accepté et accueilli fraternellement chez des proches mais aussi parfois chez des inconnus, sachons être les accueillants, celles et ceux qui reçoivent.

Celles et ceux d’entre-nous qui ont voyagé au Moyen Orient ou dans de nombreux pays d’Afrique sont souvent frappés de l’hospitalité de leurs habitants. Bien souvent, ce sont ceux qui ont le moins qui sont capables de donner le plus.

Notre Europe occidentale et son agence de surveillance des frontières Frontex font tout pour cadenasser l’union européenne. De façon éhontée, chaque pays se défausse sur son voisin pour ne pas accueillir quelques centaines de migrants qui fuient la guerre et la misère. Pour un drame en mer, combien d’ignorés ?

Avons-nous oublié l’accueil de plus d’un million de réfugiés syriens dans l’Allemagne dirigée par Angela Merkel ? On médiatise de façon outrancière un fait divers tragique quand il implique un migrant en oubliant de citer la parfaite intégration de la plupart d’entre eux.

J’ai été frappé par le destin de Ryyan Alshibi, jeune syrien arrivé en Allemagne en 2015 et qui a été élu maire de la commune rurale d’Ostelsheim en mars dernier après l’obtention de la nationalité allemande. Il est possible, voir probable que ce jeune homme ait trouvé sur son chemin des personnes bienveillantes mais, à son tour, il s’est mis au service de la collectivité, des autres et de la société.

Cette belle histoire nous éloigne-t-elle de l’enseignement de Jésus à ses disciples ? Je n’en suis pas sûr et je crois qu’au contraire, elle l’illustre bien.

Christ nous rappelle en permanence qu’il y a plus de joie à donner qu’à recevoir et que le don gratuit et désintéressé doit être la norme parmi ceux qui le suivent.

Chers frères et sœurs, alors que l’été commence, que certains d’entre vous vont voyager tandis que d’autres recevront leurs proches, laissons parler notre cœur et écoutons le Seigneur qui nous dit :

« Je vous le déclare, c’est la vérité : la personne qui donne même un simple verre d’eau fraiche à l’un de ces plus petits parmi mes disciples, parce qu’il est mon disciple, recevra sa récompense »

Amen