Une retraite régionale où a soufflé l’Esprit

Retraite régionale

Premier weekend du printemps

En ce premier weekend du printemps, la région Sud-Ouest de notre Eglise avait organisé sa retraite spirituelle.

C’est la communauté des sœurs cisterciennes de Boulaur dans le Gers qui nous accueilli dans son abbaye. Cette dernière fut fondée au XIIème siècle et mis à part quelques décennies, la présence des moniales a été constante depuis près de 9 siècles.

Outre l’hôtellerie, la communauté qui nous accueillait gère un domaine agricole de plus de 100 hectares et y élève un troupeau de 30 vaches dont le lait permet la fabrication d’un fromage fermier , le « St Germier » que les retraitants ont pu goûter et apprécier lors des repas.

Notre groupe a eu la joie et le plaisir d’écouter et de dialoguer avec le pasteur et théologien Michel Bertrand qui était venu avec son épouse. Il nous a proposé une belle réflexion déclinée en 3 temps, 3 thèmes, liés, reliés entre-eux, crise, spiritualité et espérance.

Ces 3 séquences réparties sur le weekend ont pu être suivies d’échanges plus informels avec Michel Bertrand qui s’est rendu très disponible pour dialoguer avec tous les retraitants.

La première intervention fut donc consacrée à notre société et notre humanité « en crise ». Cette crise est multiforme : crise sanitaire, crise écologique, crise diplomatique et militaire avec la guerre en Ukraine, témoignent de cette période si particulière qu’est la nôtre entre doutes et questionnements qui nous mettent face à nos limites et notre finitude.

Michel Bertrand nous a permis d’aborder cette première thématique en se référant tant à des philosophes et sociologues athées qu’ à la Bible. Ainsi, il cite Edgard Morin qui écrit que « l’arrivée du virus du Covid doit nous rappeler que l’incertitude reste un élément inexpugnable de la condition humaine ».

En parallèle, notre intervenant nous rappelle que la foi chrétienne assume le tragique de l’existence humaine ; le culte de la toute-puissance, de la maîtrise absolue est totalement remis en cause à la croix.

Ainsi Paul écrit aux Corinthiens que la puissance de Dieu donne toute sa mesure dans nos faiblesses : « Car lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort » (2Cor ; 12/9).

Les périodes de crise sont souvent révélatrices de la complexité du réel, et si elles sont si difficiles à vivre, c’est que nous avons en permanence besoin d’apaiser nos peurs et de nous rassurer.

C’est justement dans les temps de crise qu’il est nécessaire de s’exercer à une « intelligence de la foi », cette foi qui n’est ni un savoir, ni une doctrine mais l’expression d’une rencontre avec le Christ, un Christ qui nous ouvre à l’autre au Tout Autre.

Le deuxième volet de la retraite a été l’occasion d’une réflexion sur la spiritualité aujourd’hui. Michel Bertrand relève que ce terme est un « mot valise » que l’on assimile trop souvent à la religion, la croyance, la foi voir l’Eglise.

Si la spiritualité dépasse le cadre du religieux, pour nous chrétiens elle a partie liée bien sûr à l’Esprit. Luther et Calvin qui se méfiaient des enthousiastes et de l’illuminisme rappelleront qu’on ne saurait dissocier l’Esprit de la Parole biblique, cette dernière agissant un peu comme un garde-fou. Ainsi, hors du lien avec la Bible, la spiritualité chrétienne pourrait se mettre en danger.

Par ailleurs, spiritualité et engagement doivent aller de pair dans une société où l’urgence semble dicter toutes les conduites ; le cheminement de foi s’inscrit dans la durée.

La dernière partie de l’exposé abordait le thème de l’espérance. Il n’y a pas d’espérance « à bon marché » et l’espérance ne peut faire l’impasse sur l’énigme du mal.

Les horreurs du totalitarisme, les désillusions, la fin « des lendemains qui chantent » sont là pour montrer que l’espérance n’est ni naïveté, ni cataplasme.

Ainsi, dans la Bible, le chrétien peut découvrir une espérance « en dépit de… ». Si les gilets jaunes écrivaient sur leurs banderoles : « notre futur n’a pas d’avenir », Luther, lui faisait le choix d’un désespoir confiant.

Pour nous chrétiens, l’espérance ne repose pas sur des preuves tangibles mais sur une promesse. Le théologien vaudois P.Ricca écrit que « par l’espérance, la promesse devient un projet, être soi-même projeté. L’espérance n’est pas une réponse à la crise, elle est notre réponse à la promesse ».

Michel Bertrand conclue en précisant que nous sommes appelés à l’espérance et que cet appel, c’est Dieu Lui-même qui nous l’adresse.

Comme Abraham qui espère contre toute espérance, gardons en mémoire que rien dans vie n’est irrévocable, qu’aucune situation n’est jamais définitivement bloquée.

Ce temps de partage sur un weekend a été très apprécié des 26 retraitants. Il fut ressenti comme une parenthèse bienfaisante dans nos vies agitées.

Alors, rendez-vous au printemps 2024, pour une nouvelle retraite spirituelle !

Frédéric Girard

Pasteur à Tonneins et Marmande

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